« Dis fais-moi un peu de place Ty, tu es trop gros tu le sais ça ? » Ty est maigre comme un clou. Mais l’emmerde est ma spécialité. Best veut dire emmerdeur que tu choisi. En fait, c’est pire que le mariage. Là tu ne peux pas divorcer. Et ya pas de cul pour compenser. Je le pousse, il atterrit au sol. Je m’avance et penche la tête vers le sol, le cul en l’air. « Un souci ? » Sauf que je regrette vite, je finis au sol aussi, il me tire et j’atterris sur lui. « Je vais te tuer.. » Entre bagarre et câlins, on fait la paire. On préfère la bagarre d’ailleurs. Même s’il fait des bleus celui-là ! Je finis par prendre sa main, la serrer, sourire. Mon regard veut juste dire, ne m’abandonne pas. Et une partie de moi veut croire qu’il ne le fera jamais. On est lié, par des mots, par des étreintes, par une idée. Frère et sœurs de cœurs, baigné dans une aura de perfection. On est con, on est jeune, et on s’en fout. On ne fait pas de mal, ou on bouffe. On n’insulte pas, ou on frappe. On ne méprise pas, ou on humilie. Bref, on est à prendre avec des pincettes pourtant, on interfère pas, ou peu, ça dépend qui, ça dépend pour quoi..

« Il est partit Letty. » Un vol qui tourne mal, et tout explose. Ma vie, la sienne, nous. Il m’a fait promettre de ne pas y aller. Il m’a juré qu’il ne s’en mêlait pas. Mais quand il arrive, toute la structure n’est plus. Tout a implosé. Ce n’est pas beau à voir, il y a des corps, il a des hommes, des femmes. On identifie à grand peine les restes. Mais je suis là, je suis bien là, pas lui. On me raconte, on m’expliquer, il a cru, il a pris le large, et je n’ai plus que mes yeux pour pleurer. Je frappe dans le miroir de ma chambre, le sang coule, je suis las, je suis perdue, et je laisse mes lares couler. Elle me soutient, Niko entre dans la pièce, me prends dans ses bras. Que ferais-je sans mon frère. Que serais-je sans lui. Rien. On est né le même jour. Ici même, à Rio. Papa est partit, maman est restée, et moi je n’ai pas su quoi faire. J’ai gardé le nom de mon père, il a pris celui de maman. Et puis il a fini par comprendre, j’avais besoin de lui, j’avais besoin de ses bras. Je restais là, blottie contre lui, et pas moyen de fuir. Pas moyen de le fuir, pas moyen de nier, de prétendre. Juste envie d’hurler.

« Enchantée Max. Moi c’est Es.. Leticia. » Je ne voulais pas lui donner le prénom que tout le monde utilisait, à part l’autre qui m’appelait zaza depuis toujours et mon frère qui aimait à me surnommer Letty. Je souris, il est beau, il est costaud, il a l’air intelligent – si j’avais su – mais il n’est pas pour moi, jle sais. Pourtant, je fonce, je réfléchis pas. Je caresse sa joue, ça fait des mois, des mois dont je n’ai pas rêvé, et pourtant. « Dis-moi, max, tu penses que ça, c’est fait pour durer ? » Je ne suis qu’une gosse, je ne suis qu’une femme qui vit de ses illusions. Il est fuyant, il est distant, et je ne vois rien. Parce que je l’aime. Ce n’est pas tout ce qui compte ? Pourtant je sais, qu’un jour, il ne sera plus là, il me laissera, comme ma mère a décidé que mon père ne valait plus la peine de se battre, qu’on en valait pas le coup.. Niko ne l’aime pas, et après tout, il n’a pas tort. Il me blessera, je le sais. Mais pour l’instant, j’enfouis ma tête dans ses bras, pose ma tête sur son torse, embrasse ses lèvres, joint ma main à la sienne, et le reste, je m’en fous.

« Papa, pourquoi maman part ? » Que dit la toute petite miniature chétive que j’étais. Je n’ai que cinq ans mais j’ai une vision bien à moi de tout ça. Je sais que mon père est triste et qu’il ne me dira pas même si j’insiste. Parce que de toute faon, je suis trop jeune pour comprendre qu’on puisse détruire une famille. Je suis trop jeune pour imaginer que ma mère n’avait que seize ans quand elle m’a eu et que c’était difficile pour une jeune de dix sept ans de s’imaginer avec. Trop jeune pour ne pas y penser, et m’imaginer que ma mère est parti à cause de moi, de nous, en quelque sorte. Alors je me blottis dans les bras de mon père, il me caresse les cheveux et m’explique, que c’est ainsi. Puis, je grandis, et comprend un peu, qu’avec mon jumeau de frère, c’était plus complexe. C’est là qu’on y songe, mon père a su élever deux enfants, deux enfants, sans broncher, sans lâcher tout, sans abandonner. Et ca, c’est rare.

Mon frère était toujours là, garant de mes choix, garant de ma joie de vivre. Quand je voulais pleurer, il séchait mes larmes. Il était là quand j’en avais besoin, il était là quand je n’en avais pas besoin. On a toujours été proches, toujours en contact même quand j’ai commencé à bouger, pour gagner ma vie. Ce que je faisais, il détestait. J’avais suivi une voie qu’il ne voulait pas pour moi. Mais j’avais besoin d’être dans son monde. Après tout, sans lui, que serais-je devenue ? C’est aussi là que j’ai comprit que mon frère ne tournait pas rond. Il se faisait de plus en plus rare, et il agissait de façon suspicieuse. Toujours nerveux, sur le qui vive.. Il m’a confié avoir joué avec sa vie, avoir trainé avec ceux qu’il ne fallait pas. On pense que ca vient des films, mais quand votre frère vous parle de crime organisé, de mafia, vous prenez peur. Mon frère avait toujours été quelqu’un de simple, mais de passionné, de foufou. Mais il avait été trop loin, et il comptait partir. J’avais beau pleurer et hurler que s’en aller serait la pire chose, il ne m’écouta pas. Il sortit de ma vie ce jour là, les larmes au coin des yeux.